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dimanche 30 octobre 2022
dimanche 28 juin 2015
Critique Musicale: Tiki Black - Out Of The Black (2013)

De
Paris à Manchester en passant par Douala : Esquisse d’un parcours
L’auteure-compositrice-interprète
franco-camerounaise Tiki Black voit le jour à Paris. Dotée
d’une « double-culture », le voyage et le mouvement
constitueront l’une des premières matrices créatrices de cette artiste en
devenir, la jeune fille se déplaçant fréquemment, multipliant allers et retours
entre Vieille Europe et Afrique. Des conditions conduisant très tôt Tiki Black
à l’autonomie personnelle et à développer et cultiver un attrait certain pour
la musique. En effet, si la jeune fille, qui a notamment passé son enfance dans
le port de Douala, n’a pas de réel point de chute, la musique, elle,
constituera ce précieux point d’encrage lui manquant peut être dans un premier
temps, apportant du même coup à sa vie la cohérence nécessaire[1].
De ces années passées
dans la capitale économique du Cameroun, Tiki garde en mémoire nombre de
découvertes musicales l’ayant autant marqué qu’inspiré. Parmi celles-ci
citons les musiques d’Amérique du Nord et latine ou celles d’artistes
camerounais tels Eboa Lotin ou Manu Dibango. Le cinéma ne la laissant pas non
plus insensible, elle s’intéressera également aux films indiens, produits par
Bollywood, qu’elle découvre en fréquentant les salles obscures de la ville[2].
A l’âge de quatorze
ans, alors scolarisée dans une école parisienne, elle découvre le piano.
L’histoire veut que son étude pianistique commença à l’initiative d’une de ses
amies, cette dernière lui ayant offert un livre d’enseignement musical. L’une
des premières œuvres pour piano qu’elle découvrit ensuite et étudia fut celle
du compositeur franco-polonais Fréderic Chopin. Parmi les artistes l’ayant
influencé jusqu’à aujourd’hui citons Chopin donc mais aussi Eboa Lotin, Manu
Dibango , Charles Aznavour, Bob Marley, Georges Brassens,
Queen, Dolly Parton, Haendel, Georges Moustaki, Fiona Apple, Karine Polwart,
Michael Jackson, Herbert Groenmeyer, Alanis Morrissette, Scott Walker, Elvis
Costello, Terry Hall ou encore Tori Amos.
Des artistes aux styles divers, multiples, témoignant d’un gout immodéré et
surtout d’une richesse culturelle certaine. Très attachée à la force des mots
et la portée des textes de nombre de ces auteurs, la demoiselle n’hésite pas
non plus à les traduire personnellement[3].
L’activité de
chanteuse, auteure et compositrice débuta réellement pour Tiki Black en 2006,
époque où l’artiste compose ses premiers morceaux et ébauche ses premiers
textes. La même année Tiki Black crée et anime, entourée d’une petite équipe,
le site web World Singers Songwriters avec pour objectif de mettre en lumière
les textes et œuvres d’ auteurs de chansons, célèbres, reconnus ou non,
d’époques et de genres différents à travers le monde[4] et
de rendre hommage à tout auteur l’ayant inspiré[5].
Premier évènement
marquant pour Tiki Black et annonciateur d’un début de carrière dans le monde
de la musique : sa place de finaliste du « John Lennon Songwriting
Contest 2009 Session I », décrochée en septembre 2009. Cette première
récompense personnelle permettra à celle qui est désormais résidente à
Manchester de commencer à se produire sur scène plus intensément et majoritairement
sur le territoire britannique.
Tiki se fait donc
progressivement remarquer et entame
ainsi, dès janvier 2011, la conception et la réalisation de ce qui deviendra
son premier projet musical. Deux ans environ seront nécessaires à l’artiste
pour accoucher d’Out Of The Black, effort discographique publié par le label No
Sugar Added Records, sorti officiellement le 16 juillet 2013. Cette œuvre est
décrite par son auteure elle-même comme un album thématique ayant pour
épicentre la création et la créativité personnelle servant à exorciser nos
peines et peurs diverses.
Se vouant à la création
musicale, la jeune femme n’en néglige pas moins les diverses opportunités
s’offrant à elle. C’est ainsi que Tiki Black se lance, en fevrier 2013, dans l’aventure radiophonique, devenant
productrice et animatrice bénévole de l’émission « I Write The Song »,
diffusée sur les ondes de la radio anglaise Canalside’s The Thread 102.8fm[6].
L’émission « I Write The Song » propose à ses auditeurs de découvrir des
musiques et genres musicaux du monde entier, de toutes époques, de découvrir de
nouveaux talents et propose également
des focus sur les songwriters, si chers à Tiki Black.
Auteure, compositrice, interprète,
productrice, animatrice Tiki Black à plus d’une corde à son arc, une supplémentaire
viendra s’y ajouter en à la fin de l’année 2014. En novembre dernier Tiki
entame une nouvelle collaboration, avec cette fois un titre en ligne, VertiKal
Life Magazine[7],
journal pour lequel elle endosse le rôle de « Creative Director ».
Nonobstant ses
différentes activités, Tiki Black ne néglige point l’élaboration de son second
album à paraitre et poursuit actuellement la promotion d’Out Of The Black,
album sur lequel nous allons maintenant nous pencher plus en détails.
Out
Of The Black : lumière tamisée
Conçu entre janvier
2011 et juillet 2013, l’album Out Of The Black fut enregistré et mixé aux
Cottonmouth Studios de Manchester par Chris Hamilton, ce dernier partageant
avec Tiki Black la casquette de producteur sur ce disque. Le mastering est lui
l’œuvre d’Éric James et s’est déroulé dans l’enceinte du studio Philosopher
Barn Mastering, situé dans le district de North Norfolk.
Out Of The Black voit
se côtoyer en son sein relativement peu de musiciens. En effet, Tiki Black, à
qui l’on doit textes et musiques, qui assure l’ensemble des vocaux et des
chœurs ainsi qu’une partie de piano sur l’un des dix titres que compte l’album,
est ici accompagnée et secondée par sept personnes au total. On retrouve
ainsi : John Ellis, pianiste sur neuf titres, le djembefola Sidiki
Dembele, le bassiste Matt Owens, Chris Hamilton aux percussions enfin Rachel
Shakespeare, Michael Christopher Calvert et Niko Paterakis se sont eux chargés
des lignes de violoncelle et des différents arrangements. Fait remarquable, aucune
six cordes n’est présente sur cet album !
L’album Out Of The
Black renferme un son de qualité dont la production et les divers arrangements
mettent avant tout en valeur les éléments constituant la matrice musicale de
cet ensemble : la voix de Tiki Black et le piano. Pour ce faire, le choix
judicieux du minimalisme, de l’essentiel fut opéré. Les titres ne souffrent
nullement de surproduction, inutile d’y chercher la note de trop, tout juste
sont –ils souvent et joliment agrémentés de percussions et de cordes assez
légères et aériennes. Une production minimaliste, propre, carrée et peaufinée,
sans prétention ni esbroufe, certes très lisse mais que ne dépare pas une
certaine finesse et qui confère à l’ensemble de cette collection de chanson son
homogénéité sonore.
La voix de Tiki Black,
dont on devine aisément toute la puissance et l’étendue, œuvre dans un registre
empreint de nuance et sensibilité, aucune démonstration vocale éhontée et
abusive de sa part, la jeune femme évite les poncifs des chanteuses dites
« à voix », sa performance
tout au long du disque n’en est que plus agréable et appréciable. Des
prestations vocales réussies se lovant parfaitement dans chacun des dix écrins
musicaux, taillés pour mettre celles-ci, ainsi que les textes les accompagnants,
en valeur.
Les textes font indéniablement la part belle à
l’interception, aux émotions et au ressenti. De cet ensemble se dégage une
mélancolie certaine, les mots révèlent les maux… Si Tiki fait, à première vue,
part de son expérience personnelle, elle le fait en réussissant à exploiter des thèmes et sentiments d’ordre
fédérateur et universel, tels la peur et la peine, par exemple. Ainsi aucun
auditeur ne restera au bord du chemin et cette découverte se verra accompagnée
par l’ambiance musicale très intimiste du disque et l’impression de douceur
s’en dégageant. Sur ce point, Tiki déclare :
« Si
ma musique commence à partir de mon expérience personnelle, elle tire des
leçons plus universelles en regardant des situations et des émotions semblables
à travers le temps et de par le monde. »[8]
L’opus s’ouvre sur le
titre Free Like Smoke, une
composition révélant et mettant d’entrer en valeur ce qui constituera le
fondement, voire l’essence, de chacun des neuf autres titres : la
prédominance du piano et de la voix, toujours parfaitement mise en avant. Le
titre débute sur un gimmick de clavier, à la fois simple et accrocheur, sur
lequel se plaque d’entrée la voix d’une Tiki Black dont l’émotion semble immédiatement
perceptible. Une basse à la ligne ronde et simple ainsi qu’un violoncelle
viendront orner cet ensemble vers la moitié du titre, se voyant ensuite pourvu
d’un gimmick de percussion minimaliste et de quelques chœurs. Une entrée en
matière réussie qui donne d’emblée le ton général de l’opus et qui se verra
commercialisée en single au cours de l’année 2014[9]. Sur
cette version simple Tiki est accompagnée par la musicienne est chanteuse
anglaise Jo Bywater, cette dernière signant pour l’occasion un travail sur les
harmonies, les arrangements et les lignes de guitares. Une version toute aussi
réussie et ne déparant en rien la version originale se trouvant sur cet album.
Atmosphère similaire et
chant du même acabit sur Listen, le
second titre. Le morceau est entamé par un intéressant gimmick de piano que
vient vite souligner la basse. Les cordes se joignent à l’ensemble avant que
les cordes au son cristallin du nkoni[10]
ne se fassent remarquer.
C’est par une
introduction jouée conjointement par le piano et la basse que débute Swollen, sur laquelle se plaque la voix
de Tiki Black. Les percussions et cordes apportant ensuite à ce titre un aspect
quelque peu mouvant.
L’éponyme Out Of The Black arrive ensuite et nous
propose un motif pianistique légèrement
plus enlevé que précédemment, que vient ponctuer la lourdeur d’une basse
pourtant assez discrète sur cette composition. Une certaine tension est
perceptible sur ce morceau, tension que soulignent joliment violoncelle, nkoni
et percussions. Tiki propose ici une prestation vocale aux accents empreint de
gravité.
Escape,
le titre suivant, et dernier simple en date, est pourvu d’une entame de piano
et de basse sur laquelle l’instrument à corde délivre une ligne légèrement plus massive et martiale que
précédemment et qui semble, même indirectement, traduire cette envie
d’échappée. Une impression soulignée à propos par l’ornement de violoncelle,
percussion et quelques chœurs.
Etna
se signale par une introduction jouée au piano des plus cristallines qui s’écoule
sur toute la durée du morceau, soit 3 minutes et 33 secondes. Un titre en
piano/voix, véritable concentré d’émotion, touchant et allant à l’essentiel.
Assurément l’une des plus belles pièces
du disque.
C’est par une
introduction de basse et de piano que débute Le Cinquieme Element (The Fith Element), septième titre de l’opus
et seul à être chanté dans la langue de Molière. Un choix plutôt osé à l’écoute
de la musique proposée par Black, celle-ci puissant de manière très évidente
son inspiration dans des genres tels la Soul, le Blues ou le Rythm ’n’ Blues.
Des genres musicaux pouvant, à première vue, difficilement se concilier avec la
langue française. Toutefois, l’on constate rapidement que le pari est relevé et
plutôt joliment, le texte français ne déparant en rien, tant dans sa forme que
dans son contenu, les autres textes de l’album tous écrits en anglais.
Musicalement, ce morceau bénéficie de jolis ornements délivrés par le
violoncelle et une basse relativement discrète.
Powder
Masks est, comme l’ensemble des titres de cet album,
pourvu d’une agréable introduction de laquelle se détache irrémédiablement le
piano, la basse, bien qu’audible à l’entame, demeurant mixée en retrait. Il
n’en va bien sûr pas de même pour la voix, toujours aussi présente, elle, et
mise en valeur.
Le titre Silence
(No More) s’articule prioritairement autour d’un gimmick de piano mais se
voit pourvu d’une ligne de basse plutôt légère et tout de même plus expressive
que sur nombre d’autres titres du disque, ceci demeurant toutefois
singulièrement épuré et sobre, car jamais pas n’est pris sur le clavier ou la
voix.
La chanson Open Your Eyes constitue la dixième et
dernière étape de notre itinéraire parcouru aux cotés de Tiki Black. Une
conclusion d’album sur un morceau interprété avec pour seul accompagnement le
piano. Un écrin minimaliste renforçant l’interprétation « habitée »
de cette jeune artiste. Une coda certainement à l’image de l’interprète, de son
œuvre en tout cas, gorgée de simplicité et d’émotion. On remarque que le texte
de ce titre constitue certainement un écho, une réponse à celui de Free Like Smoke, pièce ouvrant
l’opus :
Close
your eyes/ Pretend that nothing happened/ And believe that thus Truth will
hide/ Close your mind/Pretend that you’re ignorant/ And believe that thusyou
escape the martyr’s side.
Free Like Smoke
Open
your eyes/ To the shining sunand the blue skies/ Open your eyes/ Have a bite of
the moon/ O word do not hide in your cocoon.
Open Your Eyes
Une ultime invitation à
ouvrir les yeux, contempler ciel et soleil, comme pour mieux nous convaincre
que nous sommes, au bout de trente-neuf minutes, bel est bien « Out Of The
Black »…
« When pain hits
I hold my breath so she
thinks me dead
Or better yet, I
express myself Out Of The Black.
This album is that
release…
Tiki
*****
Avec Out Of The Black
Tiki Black signe un premier effort discographique de qualité, au son très
épuré, à la production et aux arrangements minimalistes, accordant la primauté
à la voix ainsi qu’aux différents textes, tous œuvres de cette jeune auteure,
lovés dans des écrins musicaux les mettant joliment en valeur. Ce dégage
de ce recueil de chansons sans prétention beaucoup d’émotion, une certaine
mélancolie laissant deviner un réel degré d’introspection. L’ensemble est à la
fois sobre, intense, maitrisé et porté par une voix suave et touchante.
Un disque auquel les
moins réceptifs reprocheront peut être une trop grande homogénéité, une très forte
similitude structurelle des compositions ou un manque d’audace dans le choix
des arrangements musicaux mais telle était la volonté de l’artiste et l’on ne
peut lui en tenir grief. De tout cela se dégagent honnêteté et authenticité.
Peut-être le second
album, actuellement en cours d’écriture et de composition, proposera-t-il une
évolution musicale sensible. Out Of The Black a quant à lui déjà séduit, tant
le public que la critique et s’est vu auréolé de deux Awards : celui de
« Best Folk/Singer Songwriter Album », remis en novembre 2013 par l’Akademia Awards ainsi
que celui de finaliste dans la catégorie
du « Best Debut Album » lors des Fatea Awards 2013.
Plus de deux ans après sa sortie, la promotion
d’Out Of The Black n’est pas achevée, en effet, cet été, ce sont Les Pays-Bas qui accueilleront Tiki
Black pour une série de concerts[11].
En attendant la
parution du second opus, nous pouvons sans problème jeter une oreille (voire
les deux…) à ce travail tout à fait recommandable !
Liste des titres :
1.
Free Like Smoke
2.
Listen
3.
Swollen
4.
Out Of The Black
5.
Escape
6.
Etna
7.
Le Cinquieme Element (The Fifth Element)
8.
Powder Masks
9.
Silence (No More)
10.
Open Your Eyes
Tiki Black, Out Of The Black, No Sugar Added
Records, 2013.
Xavier Fluet@GazetteDeParis
Publié le : 28/06/2015 par
La Gazette De Paris.

[1] Site internet de l’artiste,
section « Biographie ». Page consultée le 20/06/15. Lien : http://tikiblack.com/biographie/?lang=fr
[2] Ibid.
[3] Id.
[4] Site
web World Singers Songwriters. Page consultée le 20/06/15. Lien : http://www.worldsingersongwriters.com/
[5] Ibid. Section « The
WSS-Team ». Page consultée le 20/06/15. Lien : http://www.worldsingersongwriters.com/the-wss-team/
[6] Site
Web de Canalside’s
The Thread 102.8fm à l’adresse suivante : http://www.thethread.org.uk/canalsides-the-thread-1028fm
[7] Site Web de VertiKal Life
Magazine à l’adresse suivante : http://www.vertikallifemagazine.com/index.php/en/
[8] Cf. Note 1
[10] Le nkoni est un luth africain,
généralement pourvu de quatre cordes, occupant une place de choix au sein de la
musique classique et traditionnelle mandingue. Source : Chants et Histoire du Mandé, section
« cordophones traditionnels mandingues » Page consultée le 27/06/15.
Lien : http://chantshistoiremande.free.fr/Html/cordo1.php
Les Mandés (ou Mandinka, Mandingues) sont un
peuple d'Afrique de l'Ouest. Source : « Mandingues », Wikipédia.org. Page consultée le
27/06/15. Lien : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mandingues
[11] Cf. Note 1. Section « Musique ». Page
consultée le 28/06/15. Lien : http://tikiblack.com/?lang=fr
mardi 19 mai 2015
Critiques Musicales parues et à paraître sur La Gazette De Paris

Little Girl, Little Girl (E.P.), LG Records, 2015.
Prochain Article:

Tiki Black , Out Of The Black, No Sugar Added (Nose) Records, 2013
lundi 18 mai 2015
Critique Musicale: Little Girl - Little Girl (E.P.) - 2015

Avant
Little Girl : parcours et itinéraires divers
Il y a moins de deux
ans, en juin 2013, nous vous proposions de découvrir La Reine Noire[1],
premier E.P. autoproduit, renfermant trois titres, signé d’un artiste au
parcours plutôt singulier, à la fois riche et atypique. Luc Santiago, sous le
pseudonyme de MonnCCat, venait à l’époque de faire paraitre la première
concrétisation discographique de son nouveau projet artistique et musical.
Projet aux facettes multiples au sein duquel s’additionnent et s’harmonisent
principalement Rock des années 60 et 70, chanson, littérature, poésie, photographie,
spleen, romantisme et absinthe pour nous donner à entendre une musique jouée
sur un mode clair-obscur, au accents saturniens et gorgée d’images quelque peu
tourmentées. L’ensemble dépeignait un univers des plus personnels ne manquant
ni d’attrait ni d’intérêt pour qui, le temps d’une écoute, accepterait d’y
pénétrer.
Le bref communiqué de
presse annonçant la sortie de ce premier maxi décrivait la musique proposée par
MoonCCat comme étant une évocation tintée de Rock, Folk noire et mélancolique
aux influences Post-Punk crépusculaire, mélangeant les univers et les styles
d’artistes aussi divers que Nick Cave, Alain Bashung, les Doors ou Joy Division[2].
Une intéressante mise en perspective du programme que nous réservait cet
Extended Play.
La Reine Noire contient
des titres tous chantés en français, décrits comme recélant des textes à la
fois percutants et poétiques, se plaçant dans la lignée de ceux écrits par des
auteurs comme Edgar Allan Poe, Arthur Rimbaud ou Charles Baudelaire[3].
Ecouter La Reine Noire assurait
de découvrir une musique résolument sombre et mélancolique puisant ses racines
dans un univers où mélancolie, gothique et romantisme se conjuguent et se
répondent. Les images ainsi évoquées demeurent marquantes, cinématographiques
presque…
Une invitation à découvrir le parcours de cet
artiste aux talents multiples et à la personnalité déjà très affirmée.
En effet, le projet
MoonCCat puise son origine dans l’indéniable attrait qu’aura su cultivé Luc
Santiago pour la littérature et, plus généralement, les arts du XIXème
siècle. L’adolescent d’alors est particulièrement séduit par les écrits des poètes
maudits qui ont traversé et marqué cette époque. La vocation de poète naitra
chez lui grâce à nombre de découvertes littéraires qui ne pouvaient le laisser
insensible et le marqueront, tel le fer rouge, à jamais. Parmi ces écrits
citons, entre autres, ceux d’Isidore Ducasse, Charles Baudelaire, Paul
Verlaine, Arthur Rimbaud, Alfred Dubus, Tristan Corbière, Germain Nouveau,
Joséphin Soulary, Maurice Rollinat ou bien encore Charles Cros[4].
Luc revendique aussi
l’influence des arts picturaux, certains de ses textes pouvant naitre de
l’influence qu’ont sur lui des tableaux de Johann Heinrich Füssli, Jean
Delville, Ramon Casas, Alphonse Mucha, John Everett Millais, Gustav Klimt,
Leonor Fini, Félicien Rops, Carlos Schwabe ou Gaspar David Friedrich. MoonCCat
ne négligeant jamais de mettre en avant l’importante part de son travail
consacrée à la photographie argentique[5].
Enfin le Septième Art, notamment à travers les
réalisations de Marcel Carné, Jean Delanoy et autre Jean Cocteau, trône
également en bonne place parmi ses nombreuses sources d’inspiration.
En plus de la
littérature et de l’écriture de poèmes, de nouvelles et d’un roman, c’est le
théâtre qui, plusieurs années durant, occupera le jeune homme. Il créera même
une revue littéraire toute entière consacrée aux écrivains qualifiés de
« maudits », en quelque sorte, ses paires. Elle paraitra sous le nom
de Revue du Chat Noir. S’en suivront
quelques années cette fois consacrées au journalisme qui aboutiront à
l’ouverture d’une boutique dédiée elle à une autre des grandes passions de
MoonCCat, à savoir celle que beaucoup qualifient de « Fée verte », de
« troisième œil du poète » : l’absinthe[6].
La quarantaine
approchant, MoonCCat choisi finalement un retour à ses première amours :
l’écriture, fortement influencée par celle des poètes maudits donc, et la
musique. Un choix lui permettant également d’exploiter son savoir-faire de
multi-instrumentiste. Ayant une mainmise certaine tant sur son art
que sur son projet, l’homme écrit, chante, compose et s’illustre seul au piano,
à la basse, la guitare, la batterie et aux percussions sur chacun de ses titres[7].
Trois de ceux-ci : Western Fatal,
Dans Les Limbes et le titre éponyme
figureront donc sur le premier EP du félidé.
La Reine Noire sortie, MoonCCat apparaitra en
toute fin d’année 2013, le temps d’une chanson, sur la compilation Ave Atque
Vale. Produit par Le label indépendant Seventh Crow Records, ce disque de Rock
Alternatif/Ambiant se compose de dix-sept morceaux dus à treize artistes ou
groupes différents. La composition retenue pour l’occasion se nomme Silly Games[8].
Un premier opus longue
durée, devant s’appeler Mirroirs Des
Nuits Tragiques, est à paraitre le 1er juin prochain. Succédant
ainsi à La Reine Noire, l’œuvre se verra pressée à quelque cent exemplaires
dont
douze avec livret imprimé sur papier vergé, relié cousu main, comprenant
paroles, illustrations et anecdotes[9].
Enfin, signalons que l’artiste vient récemment
de mettre la dernière main au pendant strictement littéraire de son album, un
premier recueil de poème du même nom dont les pages livreront sonnets et
alexandrins. Reste à son auteur de trouver un éditeur…[10]
Ecrivain, poète,
photographe, journaliste, boutiquier, musicien et chanteur, Luc Santiago à
décidément plus d’une corde à son arc artistique. Celui-ci s’en verra agrémenté
d’une supplémentaire lorsque, un jour de 2013, Luc croise le guitariste Alain
Roussennac.
Ensemble, les deux
musiciens bâtiront un nouveau projet musical : un groupe, du nom de Little
Girl.
Comme tout jeune
projet, Little Girl connaitra une importante phase de « consolidation »,
le groupe faisant, dans un premier temps, face à divers changement en son sein.
Stabilisée depuis environ un an, la formation parisienne se présente désormais
en quatuor. Le batteur Fabien Dannic et le bassiste-claviériste Pascal
Isabellon ayant rejoint Roussennac et Santiago[11].
A l’image de son
chanteur, chaque membre actuel de Little Girl s’est précédemment illustré au
sein de différents projets musicaux. Ainsi, Alain Roussennac a œuvré dans le
groupe Rock parisien 18 Brumaire.
Originellement fondé en 1981, 18 Brumaire,
sous l’impulsion de nouveaux membres, reviendra aux affaires en mars 2007.
D’anciennes compositions sont ainsi exhumées et retravaillées, complétées bien
sûr par de nouveaux titres, enrichissant un répertoire proposant reprises et
titres originaux. Les premiers concerts s’enchainent ensuite et le rythme des
prestations s’intensifie l’année suivante. Une première démo deux titres
paraitra au mois de novembre 2008 et sera écoulée lors de divers concerts
parisiens donnés lors du premier semestre 2009. 18 Brumaire assure seul
l’organisation de ses concerts de l’époque, n’hésitant pas non plus à partager
la scène avec divers groupes, français comme étrangers. C’est en novembre 2009
qu’est paru Cash For CLUNKERS, son premier L.P. onze titres[12].
Avant le Rock éprouvé par
Little Girl, la matrice musicale explorée par Pascal Isabellon et sa basse fut
celle du Blues originel, l’homme ayant joué au sein du groupe Men In Blues.
Quintet de passionnés, la musique jouée par cette formation propose la
redécouverte d’œuvres d’artistes tels : BB King, Jimi Hendrix, Chuck Berry
Keith Richards, Buddy Guy, Johnny Winter, Clapton, Stevie Ray Vaughan, Albert
Colins ou Lucky Peterson…
Fabien Dannic, lui,
s’est retrouvé derrière les futs de groupes comme Mellaphone ou, plus
récemment, Kavign.
Quatuor au son Pop/Folk parsemé d’effluves
Jazz, Kavign voit le jour en 1994 et
entre en scène deux ans plus tard, le 21 juin 1996 pour la fête de la musique,
à Paris (XIII). S’en suivra l’enregistrement d’une première démo, la tournée des bars parisiens et quelques passages sur les ondes de petites
radios locales essonniennes. En 1998 est publié The Music Of Chance, leur
premier album. Une sortie qui, à l’époque,
ne laissera pas insensible le magazine Best.
Les années passent. Au
sein de Kavign départs et arrivées se succèdent entrainant une réorientation
musicale du groupe, plus Rock cette fois. Austerities succèdera à The Music Of
Chance en 2003. 2005 voit la parution d’un E.P. contenant 6 titres. Il faut
attendre 2013 pour voir Kavign rendre disponible The Book Of Illusions, son
troisième effort discographique, à la réalisation duquel prend part Fabien
Dannic, actuel batteur de Little Girl. Fabien quittera toutefois Kavign en juin
2014.[13]
Depuis sa formation le
quatuor s’aguerrit également sur scène et s’y produit, au minimum, une fois par
mois. Parmi les concerts les plus marquants de ce début de carrière, citons une
soirée passée au Cavern Club à Paris, en février dernier. Revenant sur cette
performance, Luc Santiago écrira :
« Excellent
concert. Nous y allions avec un peu d'à priori car techniquement, nous devions
brancher nos instruments en ligne, sans ampli. […] Et puis ... la magie a
opéré. Lâchés dans nos compos, nous avons séduit un public qui ne nous
connaissait pas. L'énergie, la motivation, le "feeling" a fait le
reste. Tous les membres du groupe se sont laissé emporter par la musique,
fauchant les spectateurs au passage. Des couples ont dansé sur "White
Cow-Boy" à mon grand étonnement […] Les sourires étaient comme figés sur
les visages lors des applaudissements... Pour un groupe, c'est précieux ! Cela
n'arrive pas toujours. Quant à moi, je ne me suis jamais senti aussi bien après
un Concert (oui avec un C), probablement le partage et le ressenti ... […]
Alors forcément, comme l'on était un peu méfiants, nous n'avions prévu aucune
captation. Ce concert restera donc dans les cœurs du groupe. […][14]. »
Little
Girl : seize minutes, 4 titres
Selon le communiqué de
presse, Little Girl et sa musique se définissent comme suit :
« Le
style musical du groupe parisien Little Girl évoque le rock anglo-saxon des
années 1970 à 1980 grâce à un chant émotif et puissant, une guitare garage de
1968, une basse au rythme endiablé et une batterie sauvage et imprévisible.
Quatre instruments : un son singulier. »[15]
Les textes des chansons
sont présentés comme mélodiques et narrant d’étranges histoires, se déliant
dans un écrin musical décrit à la fois comme puissamment Rock et mélodieux.
Parmi les diverses
influences reconnues et pleinement assumées par chacun des quatre musiciens,
citons celles de groupes tels The Doors, The Stranglers, The Clash, The
Cramps, The Velvet Underground ou encore The Gun Club.
C’est dans l’enceinte
du Studio Poptones que furent intégralement enregistrés et mixés les quatre
titres garnissant ce premier effort discographique, aux paroles et musiques
cosignées par l’ensemble du groupe.
La pochette, parée
d’une couleur dégageant à première vue une étonnante chaleur, porteuse en cela
d’un contraste singulier et réussi d’avec la musique, porte la griffe de
MoonCCat.
L’E.P. éponyme de Little Girl, paru le 25
avril dernier, renferme une production très « propre »,
« carrée », que l’on devine aisément très travaillée et peaufinée,
sans pour autant que l’ensemble ne souffre d’un
quelconque défaut de
surproduction ou ne paraisse trop « lisse ». Aucun des quatre
principaux éléments de ce son (chant, guitare, basse et batterie) ne se voit ici négligé ou mis
trop en avant au détriment d’un autre. Tous demeurent parfaitement audibles et
concurrent ainsi à parer l’ensemble d’une homogénéité certaine. On appréciera,
par exemple, d’être en mesure de distinguer pareillement, et ce dès les
premières écoutes, riffs de guitares et autres lignes de basses, élément
témoignant d’une certaine finesse apportée à l’ensemble du travail de postproduction
réalisé ici.
Little
Girl,
le titre éponyme connait une entame assez directe, pourvue d’une très
accrocheuse ligne de basse, que vient vite souligner un motif de guitare plus
« léger ». La batterie assure à l’ensemble un rythme soutenu mais ne
demeure nullement envahissante. Le chant semble mixé bien en avant et
rappellera sans problème à l’auditeur quelque une des déclamations vocales de
Nick Cave ou autre James Douglas Morrison. Plus discret, un gimmick joué aux claviers
se joindra finalement à l’ensemble. Le milieu du morceau laisse découvrir une
bonne intervention conjointe de la guitare et de la basse. Le texte de cette
chanson évoque la visite nocturne rendue à son épouse par un mari décédé dans
le but de lui témoigner son amour. Une scène extraordinaire que n’aurait
certainement pas reniée un auteur comme Edgar Allan Poe…
Une ambiance néo-western,
dansante est faussement festive, et ensuite à l’honneur sur White Cow-Boy, la piste suivante. La
basse et la batterie assurent une rythmique « carrée » et impeccable.
La guitare elle délivre un gimmick à la fois simple et accrocheur. Le chant de
Luc est bien plus enlevé que précédemment, presque enjoué. Un titre dont la
relative brièveté concoure à l’efficacité. Les paroles évoquent cette fois le sort d’un
homme qui, pour avoir vengé sa femme, se voit condamné et tué par une foule
vengeresse.
C’est sur un excellent
riff de six cordes, suppléé par une rythmique du même acabit, que débute le
titre William Bond. La basse se veut très
en verve sur ce mid-tempo résolument Rock, pourvu, toutefois, d’accents
faussement Pop. La guitare, toujours elle nous offre une bonne intervention
dans la seconde moitié du titre. Un moment convaincant pour ce qui constitue
certainement l’une des plus belles réussites de ce disque. Une composition
portée par la réécriture, due à la plume de Luc Santiago, d’un poème éponyme de
William Blake et abordant le thème de la sagesse et du difficile apprentissage
l’accompagnant.
Au sujet de ce titre,
semblant lui être particulièrement cher, Luc confiera :
« J'apprécie
particulièrement l'interprétation de ce titre avec mon groupe Little Girl.
Lorsque
j'ai découvert le poème de William Blake, je suis immédiatement tombé sous le
charme de ce texte dévastateur : un homme triste, malade, malheureux, mais
entouré d'anges, de bonnes fées et d'amantes qui veillent sur lui, sur son
malheur...
Des
visions oniriques de situations et de décors, des rimes pures et pleines de
sagesse, une morale à la William Blake... Difficile de ne pas résister. Je me
souviens, c'était Place des Vosges. Je m'étais installé avec mon recueil avant
une répétition et la mélodie de la chanson est venue toute seule à la lecture,
comme soufflée par quelqu'un d'autre. Un instant magique.
Nous
l'avons travaillée avec le groupe et le titre s'est construit naturellement.
Mon
seul regret : lorsque je parle de William Blake durant les concerts, personne
ne semble savoir de qui il s'agit. Heureusement, le titre plaît et j'espère que
quelque part, même si j'ai adapté son poème épique aux dimensions d'une simple
chanson, un poète est heureux. »[16]
Sins,
le quatrième et dernier titre, se signale, entre autres, par la présence en son
sein d’un bon riff de guitare et d’un gimmick de batterie très martial. La
basse apporte de son groove linéaire à cet ensemble et y occupe, de fait, une
place non négligeable. Le texte de Sins
se veut porteur d’un double sens et évoque les atermoiements d’un homme
souffrant de mélancolie.
He went not out to the field nor fold,
|
||
He went not out to the village nor town,
|
||
But he came home in a black, black cloud,
|
||
And took to his bed, and there lay down.
|
William Blake, The Pickering Manuscript., William Bond[17]
*****
Avec Little Girl, le
quatuor du même nom offre un premier aperçu de son répertoire aux matrices
multiples, à la croisée des chemins entre Rock et Poésie, revendiquant et
assumant avec force et aplomb ses diverses influences pour mieux convoquer et
ressusciter, le temps de quelques titres, ce que le Rock des années 60 et 70 a
pu offrir de plus innovant et attrayant. Les amateurs du genre ne seront guère
déçus et sauront assurement y trouver leur compte. Il n’y a ici ni esbroufe ni
tromperie sur la marchandise, le tout étant de plus très bien réalisé.
Les plus curieux
pourraient simplement se laisser séduire tant par la musique que par la force
des mots l’accompagnant. Toute œuvre étant une porte d’entrée sur un univers
quel qu’il soit, il leur appartient d’accepter de la pousser pour y pénétrer…
Un E.P. de qualité,
prologue à, souhaitons-le, un premier album longue durée du même acabit. Little
Girl est disponible en physique et sur les plateformes suivantes : Itunes, VirginMega, Fnacmusic, OVI, RealNetworks,
Musiwave, eMusic, Music Net, Medianet, Rhapsody, VidZone, Deezer, Amazon.com,
7Digital, Spotify, Beezik, Simfy.com, RDIO, Google Play Music, Aspiro Music.
Nous reste désormais à attendre un prochain
album au son de ce maxi…
Liste des titres:
1.
Little Girl
2.
White Cow-Boy
3.
William Bond
4.
Sins
Little Girl, Little Girl (E.P.), LG Records, 2015.

[3]
Ibid.
[4]
Site internet de MonnCCat,
section « Influences ». Lien : http://www.moonccat.com/influences.html
[5]
Sur le travail
photographique de Luc Santiago, voire le site internet de MonnCCat, section
« Photos». Lien : http://www.moonccat.com/photos.html
et l’adresse suivante : http://www.moonccat-photo.com/
[6]Xavier Fluet, « Moonccat –
La Reine Noire – EP », La Gazette De
Paris, 05/06/2013. Lien : http://gazetteparis.fr/2013/06/05/critique-musicale-moonccat-la-reine-noire-ep-2013/
[8]Ave
Atque Vale, Seventh
Crow Records, Decembre 2013. Lien : http://seventhcrowrecords.bandcamp.com/album/ave-atque-vale#
[10] Ibid. News du 26/04/2015.
[11] Communiqué de presse de L’E.P.
[12] « 18 Brumaire », Le Lab. Des Inrocks. Page consultée le
11/05/15. Lien : http://www.lesinrocks.com/lesinrockslab/artistes/18-brumaire/
[13] « Kavign », Zik Me Up. Page consultée le 11/05/15.
Lien : http://www.zicmeup.com/groupe/kavign/
[14] Cf. Note 9. News du 21/02/15.
[15] Cf. Note 11.
[16] Cf. Note 9. News du 21/02/15.
Libellés :
2015,
Alain Roussennac,
Critique musicale,
E.P.,
Fabien Dannic,
Gazette De Paris,
LG Records,
Little Girl,
Luc Santiago,
MoonCCat,
Pascal Isabellon,
Rock,
Sins,
White Cow-Boy,
William Bond
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